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SOMMAIRE

Première partie : Une mariée, un mariage et un départ.

Deuxième partie : La malédiction des Maurepas.

Troisième partie : Le vent du large

Quatrième partie : Vent de terre

Cinquième partie : Vent de Guerre (Jusqu’à l’épisode 22 inclus)

L’histoire de Paille : cinquième partie

Episode 48

Le passage de Sofia avait provoqué une tension importante au niveau de chacun et personne n’avait vraiment envie de dormir. Aucun feu n’avait été allumé de peur d’attirer le regard. Maurepas repensait à Ivelina et son regret qu’elle n’ait pas accepté de partir avec eux. En même temps, il comprenait parfaitement la raison qui la retenait dans cette ville. Au moment de se dire adieu, Thérèse avait tenu à offrir de nouveaux habits à la jeune fille. Elle avait fouillé longuement dans une malle avant de se décider pour une robe bleue, un joli tablier en dentelle et un très beau fichu en soie. Malheureusement, elle n’avait pas de chaussures à offrir, elle se défit des siennes et malgré les protestations d’Ivelina, elle ne céda pas tant qu’elle ne les eut pas aux pieds.

Mais ce qui avait le plus intrigué Maurepas concernait la raison pour laquelle Ivelina ne pouvait partir. Elle avait une fille dont elle devait assurer la protection. Une fille qui vendait son corps pour survivre. Alors il fallait que les gens de mauvaise vie craignent son pouvoir, surtout celui qui la logeait et s’occuper de la placer aux endroits propices. Maurepas avait voulu intervenir « Mais… » Solange ne lui laissa pas finir sa phrase. « C’est comme ça, tu n’y peux rien et nous non plus ! » Il avait tenté une nouvelle intervention, mais cette fois, ce fut Pivoine qui intervint « Puisqu’on te dit qu’on n’y peut rien ! » Et Paille d’ajouter « Tu es fatigant à la fin avec tes questions ! » Maurepas avait accepté de se taire, mais il ne comprenait pas pour quelle raison sa fille n’aurait pu l’accompagner. Il se sentait redevable envers Ivelina qui avait sauvé ses deux amis. Il se sentait d’autant plus redevable qu’il avait souhaité les abandonner.

– Dis donc l’ami, tu nous dois une suite !

Pivoine venait de parler, il sentait qu’il fallait se défaire de cette atmosphère pesante et surtout que Maurepas arrête de ruminer les mauvaises pensées qui l’envahissaient.

– Tu en étais resté au moment où les trois malfrats avaient décimé toute la famille, ajouta Petit Pierre qui était impatient de connaître la suite.

– Est-ce une bonne idée, avec ce que nous venons de vivre coupa Valentin.

– C’est mieux que le silence dit Solange qui sentait bien que Maurepas n’allait pas bien.

– Pas toute la famille. L’enfant était tombé un peu plus loin dans la broussaille lors de ma chute. Et les trois imbéciles étaient trop loin pour l’entendre chougner. Alors j’ai pris soin du petit gars pendant trois ans. On s’entendait bien. Je l’ai nourri tout en continuant à m’occuper de la ferme. Heureusement, on possédait une vache. J’emmenais ce petit gars partout avec moi, je lui avais confectionné une petite charrette en bois avec un siège pour lui.

Il y eut un silence, personne n’osa faire le moindre commentaire et respecta ce temps de recueillement où l’on sentait bien que Paille revivait des souvenirs pénibles, mais aussi de bons souvenirs.

– Seulement un jour, j’ai entendu parler de trois crétins qui s’étaient vanté d’avoir pillé une ferme. Ils étaient installés à l’auberge du village plus haut sur la route. A peine une demi-heure en coupant dans la montagne. J’ai attendu que l’enfant s’endorme, puis j’ai pris le Lebel, mon couteau de chasse et je suis parti à leur recherche. La nuit était noire comme jamais je ne l’ai vue. C’était à cause du ciel nuageux. L’auberge était à la sortie du village, une auberge mal fréquentée qui servait aussi de bordel. Les serveuses ne restaient pas longtemps, le temps de comprendre ce qu’on attendait d’elles. Je les ai trouvés ivres morts attablés devant leur pichet. L’un d’entre eux tenait encore debout. Le patron a sorti un gourdin en me voyant, puis il l’a remis à sa place lorsque j’ai pointé ma carabine sur sa poitrine. Elle n’était pas chargée, je me suis contenté de l’assommer. Les autres voyageurs ont déguerpi sans demander leur reste. Je les ai égorgés comme des cochons et je les ai regardés se vider de leur sang. Ils ont repris leurs esprits, le temps de se voir mourir. Puis je suis rentré.

Paille se coucha, ferma les yeux et on l’entendit pleurer. Les autres allèrent aussi dormir, accepté Petit Pierre qui resta pour consoler son ami. Maurepas eut un sommeil agité, il revoyait les images d’Ivelina entourée de flamme dans l’embrasure de la bâtisse incendiée. Elle le fixait de ses yeux bleus, elle tentait de lui dire une chose importante concernant son frère Lucas. Mais il n’osait pas s’approcher de peur d’être brûlé vif. Il se réveilla en hurlant, il fallut toute la douceur de Solange pour qu’il se calme. Les autres n’avaient pas réagi, pourtant aucun ne dormait vraiment.

Est-ce qu’il y a un nous de l’autre côté de la vitre ? Rien n’est moins sûr ! Je fais donc une bise aléatoire et coucou dans le vide sidéral… C’est drôle un coucou dans le vide sidéral parce qu’on ne risque pas de l’entendre du coup, le coucou… roucou…

Question métaphysique à méditer pour le week-end : si je suis là où je ne suis pas, combien y a-t-il de chances que je ne me rencontre pas ?

L’histoire de Paille : épisode 49