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SOMMAIRE

Première partie : Une mariée, un mariage et un départ.

Deuxième partie : La malédiction des Maurepas.

Troisième partie : Le vent du large

Quatrième partie : Vent de terre

Cinquième partie : Vent de Guerre (Jusqu’à l’épisode 22 inclus)

Vent  debout : cinquième partie

Episode 59

Isabelle avait l’impression de perdre la raison. Elle ne savait à quoi se raccrocher. Même ce trou, dans lequel elle pensait être tombée et où elle avait retrouvé ses chaussures ne correspondait pas à son souvenir. Il n’était profond que d’à peine un bon mètre, comment aurait-elle pu s’y noyer. Cette femme aussi qui s’adressait à elle et qu’elle n’avait pourtant jamais vue, lui rappelait quelqu’un. Elle décida de rentrer et de fouiller dans les affaires qu’elle avait rapportées de chez ses parents.

Elle courut plus qu’elle ne marcha, elle traversa la place du village comme le vent. Elle ne répondit pas aux saluts qui lui étaient adressés. Et les buveurs attablés en furent pour leur frais lorsqu’ils lancèrent une invitation afin de partager des élucubrations que l’alcool rendait confuses. Elle fit un signe rapide à sa mère et à sœur qui étendaient le linge avant de regagner sa demeure. Elle avait tenu à passer par la maison familiale pour les rassurer. Elle dit que tout allait bien, qu’elle avait récupéré ses forces et qu’elle allait mettre un peu d’ordre chez elle. Sa mère l’avait interpellée avant qu’elle ne suive le chemin qui remontait en direction de sa maison, mais elle n’avait pas jugé bon de répondre.

Elle poussa la porte de chez elle, vérifia qu’il n’y avait toujours pas de courrier sur la petite commode de l’entrée, un affreux meuble auquel tenait Lucas et dont elle finirait par le convaincre de le monter au grenier. Au moment de rentrer, elle avait toujours un pincement au cœur, craignant un courrier du Ministère des Armées lui annonçant une mauvaise nouvelle. Elle passa par la cuisine, prit le temps de se verser un verre de lait. Dans le frigo, elle se tailla une belle tranche de pâté, spécialité du père. Une tradition familiale qui remontait à l’arrière-grand-mère. Il restait un quignon de pain pour y étaler la précieuse préparation.

Avant de monter au grenier, elle attrapa un affreux tablier dédié aux tâches très salissantes et grimpa par l’escalier dont aucune des marches ne garantissait l’arrivée au sommet. Les albums de photos étaient entassés côté sous-pente. Elle passa l’après-midi à la recherche de la femme et de l’homme qui lui avaient sauvé la vie, au moins dans son imagination. Les recherches furent infructueuses, elle en profita donc pour faire du tri se promettant qu’un jour, avec son Lucas, ils se débarrasseraient de tous ces objets désuets ou bien des doublons. On trouvait une collection de manches d’outils pour le jardin, cassés ou bien usés ou encore qui n’avaient plus la bonne taille, deux tables qui faisaient le régal des termites, une lampe-tempête rouillée dont le verre était fendu, une quinzaine de draps que l’humidité avaient imprégnés et surtout des vêtements poussiéreux dont pas même un vagabond ne voudrait.

Une chose était certaine, ces personnages, qui avaient peuplé son esprit, n’appartenaient pas à sa famille. Elle redescendit, remplit un baquet d’eau, récupéra le savon qui était sur l’évier de la cuisine et elle se leva. Ses cheveux étaient poussiéreux, de nombreuses toiles d’araignée s’étaient accrochées, elle se trempa la tête entièrement. Elle se sécha, entoura ses cheveux dans une serviette et passa une longue chemise blanche. Pieds nus, elle se dirigea vers la chambre. En sortant de la cuisine, elle se trouva nez à nez avec son père ce qui la fit sursauter.

– Tu m’as fait une de ces peurs !

– Excuse-moi, ce n’était pas mon intention.

Isabelle baissa les yeux, son père tenait à la main une lettre.

– Je te dérange ? Je repasserai plus tard.

– Non, tu ne me déranges pas. Veux-tu boire quelque chose ?

– Je veux bien un café.

– Assieds-toi, je vais en faire.

– Non, ce n’est pas la peine, je disais ça parce que je pensais que tu en avais d’avance.

Isabelle n’écouta pas la réponse de son père qui persistait à rester debout. Elle avait besoin de s’occuper les mains. Elle sortit la cafetière à percolation, un modèle italien que lui avait offert par Lucas, tout fier de sa trouvaille. Le café était dans le petit placard du bas dans sa boîte en fer-blanc. Elle versa trois grosses cuillers maladroitement. Elle avait du mal à contrôler les mouvements de son bras tellement elle était tendue. Une partie tomba à côté.

– Laisse-moi faire !

Son père déposa la lettre sur le coin de la table de la cuisine et s’occupa de verser le café puis d’ajouter l’eau. Il alluma le gaz et mit la cafetière sur le feu. Pendant tout ce temps, le regard d’Isabelle passait de son père à la lettre, déposée à l’autre bout de la table.

– C’est le Ministère n’est-ce pas ?

– Oui.

– L’as-tu ouverte ?

– Non, ta mère voulait que je le fasse, mais j’ai refusé.

– Comment se fait-il qu’elle soit arrivée chez vous ?

– Le facteur pensait que tu vivais chez nous en attendant le retour de….

Mais il ne finit pas sa phrase.

 Y a comme un ronronnement qui se fait entendre… soit c’est le moteur de ma voiture, soit c’est un chat qu’est planqué sous le capot ! Une miaoubise à la Metro Golwyn Mayer du Chat !

Terre de feu : épisode 60